Blondino

21 Juin, 01h00

Il est des citadelles qui se conquièrent sans heurts ni cris, des remparts qui s’abattent à mots feutrés, des révolutions aussi tranquilles qu’un lac. Avec son deuxième album, « Un paradis pour moi », Blondino s’offre « un luxe qui n’a pas de prix » : dessiner les contours d’un univers profondément personnel, laisser se déployer son art si nuancé et si sauvage à la fois, s’affranchir des compromissions et des regards tournés vers le passé. Sortie du labyrinthe où l’enfermaient ses doutes et ses craintes, où l’épiait un Minotaure toujours prêt à la dévorer, la chanteuse, telle un « Centaure » se permet toutes les audaces et bouscule pop et chanson en les réinventant, en digne héritière de Bashung et de Christophe qu’elle est.

Manifeste prométhéen d’émancipation, ce « paradis » intime mais jamais égotiste se chuchote à notre oreille comme un merveilleux secret. Chantant très près du micro pour influer directement sur l’imaginaire de l’auditeur, Blondino distille une poésie subliminale au service de planantes mélodies. Voix si singulière qu’elle semble s’insinuer en nous jusqu’au vertige, nous envelopper d’espoir, voix charnelle et amie qui nous réconforte avec l’humain. Voix qui ne hausse jamais le ton, même quand elle chante « Mes indépendances et ma révolte », voix qui ose être elle-même, à l’instar d’autres grandes et envoûtantes voix féminines qui ne trichent pas, comme celles de Weyes Blood, de Fiona Apple ou de Cat Power.